When Harvey met Irma
A l'heure où j'écris, Irma - le plus puissant ouragan observé jusqu’à présent dans l'Atlantique - progresse vers Cuba et la Floride et a déjà tué neuf personnes dans les Antilles françaises. Nous avons tous entendu parler de Harvey, l'ouragan qui a causé au moins 70 morts et des inondations catastrophiques au Texas et en Louisiane, dans les derniers jours du mois d'août. Moins médiatique, en Inde, au Népal et au Bangladesh, la mousson a été tristement qualifiée d'historique par les Nations Unies : 41 millions de personnes affectées, 1 400 morts et des centaines de milliers de sans-abri. Des pluies torrentielles ont causé des coulées de boue meurtrières en Sierra Leone, le 14 août (au moins 500 morts) et en République démocratique du Congo, le 16 août (environ 200 morts). Un cauchemar...
Vue satellite de l'ouragan Irma, 5 septembre 2017. NOAA/REUTERS |
Et au milieu de ce cauchemar, une question a été récurrente : le changement climatique a-t-il causé ces catastrophes ? Certes, la saison est celle des ouragans dans l'Atlantique - José et Katia suivent d'ailleurs Irma - et de la mousson en Asie du Sud, mais il a semblé impossible de ne pas parler des changements climatiques quand on fait face à une telle séquence de catastrophes naturelles. Des militants proposent d'ailleurs de rebaptiser ouragans et typhons du nom des 90 entreprises responsables des deux tiers des émissions industrielles de gaz à effet de serre selon des recherches récentes. Irma et Harvey ont ainsi été renommés Chevron et Exxon.
Pourtant, les scientifiques ne sont pas unanimes sur le lien direct qui peut être établi entre une catastrophe naturelle et actuelle et le changement climatique. En effet, alors que certains scientifiques américains ont été prompts à faire le lien, « il reste très difficile de distinguer l’impact du changement climatique de la variabilité naturelle du phénomène et il est actuellement impossible d’attribuer le changement climatique à un cyclone en particulier », d'après Christelle Barthe, chargée de recherche au laboratoire de l’atmosphère et des cyclones du CNRS (entretien avec Reporterre). La question « le changement climatique a-t-il causé cette catastrophe ? » n'est donc pas la bonne, dans l'état actuel de nos connaissances et aussi peu de temps après la catastrophe en question.
En revanche, les scientifiques sont unanimes sur un autre point : s'il est impossible de dire avec certitude que le changement climatique crée et/ou va créer plus d'ouragans, typhons, et autres tempêtes, il est certain que leur puissance, leur intensité et donc leurs dégâts vont augmenter, en partie à cause du changement climatique. Christelle Barthe explique ainsi que « les scientifiques prévoient une augmentation des vents cycloniques de 10 % et une augmentation des précipitations associées aux cyclones de 20 %. C’est donc une augmentation des cyclones à forte intensité, comme Harvey et Irma qui est attendue dans les prochaines années. »
La raison en est double : d'une part, l'augmentation de la température de l'atmosphère signifie plus d'humidité dans l'atmosphère (c'est là qu'entre en jeu la formule de Clapeyron pour les scientifiques parmi nous) et donc de plus fortes précipitations et davantage d'inondations. D'autre part, le niveau de la mer augmente à cause du changement climatique et les vagues seront donc plus hautes, accroissant le risque d'inondation en zone côtière. « Avec ces deux éléments, on peut dire que des ouragans touchant des îles peu élevées vont donc créer des dommages plus importants, même s'ils ont les mêmes caractéristiques qu'aujourd'hui », conclut Robert Vautard, autre climatologue au CNRS (entretien avec Le HuffPost).
Face à ces questions, des voix se sont élevées pour demander la fin de ces débats, qui « politiseraient » les catastrophes, à un moment où l'on devrait seulement laisser les secours faire leur travail, d'après eux. Je ne suis pas d'accord.
Il est temps de débattre et de parler des changements climatiques, tous les jours et mieux - et cela ne nous empêchera pas de penser aux victimes et de les aider, bien au contraire... n'en déplaise aux sceptiques qui réclament le silence. Il est temps de se mettre au travail pour de vrai, pour vraiment diminuer nos émissions de gaz à effet de serre et pour diminuer les dégâts. Et il est temps de parler d'adaptation et de résilience parce que, quel que soit le niveau d'atténuation que nous arriverons à atteindre, il va nous falloir nous adapter à des climats moins cléments.
En revanche, les scientifiques sont unanimes sur un autre point : s'il est impossible de dire avec certitude que le changement climatique crée et/ou va créer plus d'ouragans, typhons, et autres tempêtes, il est certain que leur puissance, leur intensité et donc leurs dégâts vont augmenter, en partie à cause du changement climatique. Christelle Barthe explique ainsi que « les scientifiques prévoient une augmentation des vents cycloniques de 10 % et une augmentation des précipitations associées aux cyclones de 20 %. C’est donc une augmentation des cyclones à forte intensité, comme Harvey et Irma qui est attendue dans les prochaines années. »
La raison en est double : d'une part, l'augmentation de la température de l'atmosphère signifie plus d'humidité dans l'atmosphère (c'est là qu'entre en jeu la formule de Clapeyron pour les scientifiques parmi nous) et donc de plus fortes précipitations et davantage d'inondations. D'autre part, le niveau de la mer augmente à cause du changement climatique et les vagues seront donc plus hautes, accroissant le risque d'inondation en zone côtière. « Avec ces deux éléments, on peut dire que des ouragans touchant des îles peu élevées vont donc créer des dommages plus importants, même s'ils ont les mêmes caractéristiques qu'aujourd'hui », conclut Robert Vautard, autre climatologue au CNRS (entretien avec Le HuffPost).
Face à ces questions, des voix se sont élevées pour demander la fin de ces débats, qui « politiseraient » les catastrophes, à un moment où l'on devrait seulement laisser les secours faire leur travail, d'après eux. Je ne suis pas d'accord.
Il est temps de débattre et de parler des changements climatiques, tous les jours et mieux - et cela ne nous empêchera pas de penser aux victimes et de les aider, bien au contraire... n'en déplaise aux sceptiques qui réclament le silence. Il est temps de se mettre au travail pour de vrai, pour vraiment diminuer nos émissions de gaz à effet de serre et pour diminuer les dégâts. Et il est temps de parler d'adaptation et de résilience parce que, quel que soit le niveau d'atténuation que nous arriverons à atteindre, il va nous falloir nous adapter à des climats moins cléments.
Maud Vandoolaeghe
Pour aller plus loin :
Fanny Dolberg, « L’augmentation de la puissance des cyclones est causée par le changement climatique », Entretien avec Christelle Barthe, Reporterre, 07/09/2017 : https://reporterre.net/L-augmentation-de-la-puissance-des-cyclones-est-causee-par-le-changement
Stéphane Foucart, « La planète subit de plein fouet le dérèglement climatique », Le Monde (édition abonnés), 08/09/2017 : http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/09/08/la-planete-subit-de-plein-fouet-le-dereglement-climatique_5182566_3244.html#1oQW0GL8JSQf408o.99
Gregory Rozeires, « Ouragans Harvey, Irma, Jose... la faute au réchauffement climatique ? C'est plus compliqué que ça...», Entretien avec Robert Vautard, Le HuffPost, 06/09/2017 :
http://www.huffingtonpost.fr/2017/09/06/ouragans-harvey-irma-jose-la-faute-au-rechauffement-climatique-cest-plus-complique-que-ca_a_23198411/
Michael Mann, climatologue, Université de Penn State, sur Facebook, 27/08/2017 :
David Roberts, "Climate change did not 'cause' Harvey, but it’s a huge part of the story", Vox, 29/08/2017 : https://www.vox.com/energy-and-environment/2017/8/28/16213268/harvey-climate-change
Natasha Hakimi Zapata, "Hurricanes Irma and Harvey and the Conversation About Climate Change", truthdig, 07/09/2017 : https://www.truthdig.com/articles/hurricanes-irma-harvey-climate-change-debate/
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